Le Mur des Fermiers Généraux : la Barrière du Trône

On continue à propos du « Mur des Fermiers Généraux » avec un petit focus sur les principales barrières mentionnées dans Les Mystères de Paris :

C’est dès l’épisode 3 de la série (Chapitre 14 – le livre a 166 chapitres ; ils sont réduits en 40 épisodes dans notre série) qu’il en est question, quand Rodolphe passe par la barrière de Saint-Denis pour mener Fleur de Marie à la campagne, à Bouqueval, “un petit bled tranquille dans le 9-5, après Sarcelles”.

Ce village de Bouqueval (voir Wikipedia pas passionnant) existe. Le père d’Eugène Sue, fameux chirurgien de l’époque napoléonienne, y avait un château (aujourd’hui démoli) ; sa tombe est, en revanche, toujours dans le cimetière du village. (Est-ce par provocation qu’Eugène Sue, qui ne s’entendait pas du tout avec son père, situe la ferme modèle – très fourriériste, nous en avons parlé dans le chapitre sur les « socialistes utopiques » – en terre paternelle ?…)

Mais revenons aux barrières qui sont aussi le décor du début de l’épisode 4 de la série (chapitre 15 du livre) pour le rendez-vous entre Rodolphe, le Maître d’école et la Chouette :

Dans le livre d’Eugène Sue, ce rendez-vous se passait normalement à la Barrière de Bercy. Nous l’avons transposé à la Barrière de Vincennes (ou Barrière du Trône, selon les années) pour deux raisons : nous ne trouvions pas de gravure intéressante de la barrière de Bercy ; et ce petit déplacement nous permet aujourd’hui de souligner que cette barrière était entourée de deux bâtiments jumeaux que l’on voit ci-dessus et qui existent toujours, vous regarderez la prochaine fois que vous allez sur la Place de la Nation, à l’entrée du Cours de Vincennes.

Même si le Mur des Fermiers Généraux fut détruit très vite en 1860, il reste quatre derniers vestiges des pavillons d’octroi construits par Ledoux de Paris. Connaissez-vous les trois autres encore visibles aujourd’hui ?

– Le beau bâtiment de Stalingrad que la ligne 2 du métro contourne d’une jolie courbe entre la station Stalingrad et la station Jaurès. Faisant partie des bâtiments conçus par Ledoux, il s’agissait néanmoins plutôt d’un bâtiment administratif situé entre les barrières de La Villette et celle de Pantin. Puis il a perduré comme caserne de gendarmerie. Aujourd’hui, c’est un bar-restaurant.

– La petite rotonde qui est à l’entrée du Parc Monceau. Elle sert désormais de bureau aux gardiens du Parc.

– Les deux bâtiments jumeaux de la place Denfert-Rochereau dont l’un est devenu l’entrée du Musée de la Libération de Paris et l’autre, celle des Catacombes.

Revenons sur la barrière de Vincennes : Au cours de la préparation de la série, nous avions trouvé à acheter une gravure de Villevieille datant de 1858.

Mais, du temps des Mystères de Paris, les deux statues surmontant les colonnes (Saint-Louis et Philippe-Auguste) n’existaient pas encore et Matthieu Dubois les a, entre autres modifications, éliminés d’un habile coup de palette graphique.

Sur le plan de Girard de 1840, on voit bien l’emplacement de la Barrière.

En enquêtant pour cet article au sujet de la place de la Nation (appelée jadis place du Trône mais aussi, sous la Révolution, la place du Trône Renversée !), j’ai trouvé curieux et amusant que l’on prévoie, par deux fois, en 1670 et 1862, de construire un arc de triomphe qui devait faire écho à celui, bien connu à l’Ouest, de la place de l’Étoile. Aucun arc ne fut finalement réalisé. Pourtant, grâce au Musée Carnavalet, on trouve une photographie de celui-ci de 1862 :

Alors quoi ? Un fake ? une image IA ? Que nenni ! Il se trouve que – marrant ! – fut érigée une simulation grandeur nature (en stuc ?) de cet arc. Ça me rappelle l’éléphant de Gavroche dans Les Misérables !

PS : Les pavillons d’octroi de la Barrière de Vincennes ont été réhabilités en HLM. Si cela a été bien fait, ça doit être sympa d’y habiter !

PS2 : A propos des pavillons d’octroi (qui s’appellent en effet des propylées) de Claude Nicolas Ledoux, je conseille l’extraordinaire reconstitution/modélisation 3D de Monsieur Elmer. Bravo !!

Crédits photographiques : Captures d’écran des épisodes 3 et 4 – Gravure de Villevieille parue dans L’Illustration en 1858 – extrait du plan de Girard de 1840 (collections personnelles) – Photographie de l’Arc de la Place de la Nation, Musée Carnavalet

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